Sonnet qu’on dit être de M. de Saint-Evremond
Sonnet qu’on dit être de M. de Saint-Evremond
Sonnet qu’on dit être de M. de Saint-Evremond
Nature, enseigne-nous par quel bizarre effort
Notre âme quelquefois hors de nous est ravie ;
Dis-nous comme à nos corps elle-même asservie
S’agite, s’assoupit, se réveille et s’endort.
Les plus vils animaux, plus heureux dans leur sort,
Vivent tranquillement, sans crainte et sans envie,
Exempts de mille maux qui troublent notre vie
Et de mille frayeurs que nous donne la mort.
Assemblage confus d’esprit et de matière,
L’homme vit avec trop ou trop peu de lumière
Pour distinguer ses biens et connaître ses maux.
Change l’état obscur dans lequel tu nous ranges,
Nature, abaisse-nous aux sens des animaux
Ou bien élève-nous à la clarté des anges.
Mazarine 2356, f°21r